Ile d'Oléron - N°103 - Mars/Avril 2010
La tempête meurtrière
La
tempête Xynthia, qui a touché la France dans la nuit
du 27 au 28 février, a causé la mort de plus de 50
personnes en Vendée et Charente-Maritime, dont une habitante
de Boyardville, et de nombreux dégâts
matériels. La conjonction des vents violents et une forte
marée a donné lieu à un réhaussement du
niveau de la mer qui a occasionné d'importantes inondations,
principalement en Charente-Maritime et en Vendée. La
tempête Xynthia est considérée comme une des
plus violentes et des plus meurtrières depuis les
tempêtes de décembre 1999.
Les visages fermés, les traits tirés et inquiets… Les élus de Saint-Georges ont installé, lundi matin, 1er mars, une cellule de crise dans la salle du conseil municipal. Saint-Georges a payé un lourd tribut lors du passage de Xynthia puisqu’une octogénaire a perdu la vie, noyée dans sa maison inondée. Alors que les habitants s’organisent, les pompiers sont toujours à pied d’œuvre à Boyardville, submergée par les eaux à la suite de la rupture de la digue de la Perrotine. La pluie persistante ajoute à la désolation. Ici, des propriétaires de restaurants évacuent la boue de leur établissement, un autre tente de raccrocher une enseigne qui menace de s’écrouler, à proximité, des habitants chaussent des cuissardes afin d’embarquer dans le canot des pompiers qui doit les amener chez eux récupérer ce qui peut l’être (photo ci-dessous). Déjà une première embarcation arrive avec à son bord deux habitantes hébétées. Un ancien, Oléronais «depuis toujours», avouait que «de mémoire d’Oléronais, on n’avait jamais vu ça, jamais». Et partout des pompiers qui s’activent autour de gros tuyaux chargés de pomper l’eau. Les gendarmes aussi sont présents pour surveiller la zone et protéger ce qui peut l’être encore dans les habitations. Car si la solidarité est bel et bien présente, cela n’empêche pas le vol dans les maisons délaissées dans la nuit par les habitants surpris par la brusque montée des eaux. Comment décrire cette zone si touristique, aujourd’hui sous les eaux. Un vrai sentiment de désolation, de tristesse.
A La Brée, la tempête semble avoir fait une pause. Quelques pins élagués sur le front de mer. Du sable qui est parti, un arbre tombé dans une propriété… La commune a été épargnée. La route des Trois-Pierres, à Saint-Denis n’existe plus. Le bitume est parti, volatilisé. A Chassiron, les barrières de protection devant la falaise sont à terre. La digue aussi a souffert.
Les plages de Saint-Pierre à Saint-Trojan témoignent de la force de Xynthia. Partout la même scène désolante : les plages saccagées, souillées... enfin quand elles sont encore accessibles ce qui n’est plus le cas à Grand-Village. Le vent et la marée ont coupé la dune à grands coups de serpe. Impossible de descendre sur ce qui était, il y a encore quelques jours, une plage. Un grand vide apparaît au bout du chemin d’accès. Un blockhaus oublié refait même surface. Les blockhaus justement de la plage de Vertbois, à Dolus, qui étaient voués à disparaître dans les mois à venir, semblent suspendus. Quant au trait de côte, il a reculé inexorablement. Même cause, même effet à Saint-Pierre et sur les plages de la Biroire ou de la Menounière. A Saint-Trojan, les pompiers sont omniprésents, essayant de combattre l’eau qui s’accumule sur le parking face au port. L’odeur de fuel, qui prend à la gorge, apporte une touche supplémentaire au spectacle de désolation. Une équipe de dépollution est d’ailleurs présente, tout comme au chantier naval de la Perrotine immergé où 50 m3 de fuel doivent être pompés. A Saint-Trojan donc l’eau a pris possession du front de mer : le parking face au port, mais aussi celui face à la place du Marché, le terrain de jeux est transformé en piscine, la caserne des pompiers et la salle des fêtes inutilisables car sous les eaux… La commune du Château, enfin, n’a pas échappé à cette tempête. La D 734, entre le pont et la commune, est jonchée de détritus, de casiers d’ostréiculteurs. Là, une cabane éventrée sur le bord de la route. Ici, un bateau échoué sur la route. ça et là des mannes éparpillées. Malgré tout, dès lundi, la vie reprenait son cours : on s’attachait à faire disparaître le plus vite possible les stigmates du passage de Xynthia. La saison est toute proche. Mais pour Lionel Pacaud, directeur de la Maison du tourisme, tout sera prêt pour accueillir les vacanciers. «Aujourd'hui, nous revoyons le plan de communication puisque nous avions des campagnes qui devaient commencer dans quelques jours. D'un point de vue touristique, hormis Boyardville, Saint-Trojan et une partie du Château, 99% des installations hôtelieres, campings et villages vacances sont opérationnelles. Ensuite, il faudra rassurer les visiteurs potentiels. Nous allons retrousser nos manches.»
Lundi 1er mars, après avoir survolé en hélicoptère les côtes charentaises, Nicolas Sarkozy, président de la République, a annoncé une série de mesures d'urgence qui allaient être prises par le gouvernement. Ainsi, à la demande de ce dernier, l'Union européenne a accepté d'activer le fonds de solidarité communautaire. Il remboursera une partie du coût des interventions publiques (remise en état des infrastructures, notamment).
De plus, les foyers sinistrés pourront obtenir des délais de paiement de leurs impôts. Ceux dont l'habitation a été détruite ou est vouée à la démolition n'auront plus à payer de taxe d'habitation ni de taxe foncière. Ceux qui ont subi des dégradations de leur habitat pourront payer moins d'impôts locaux. En effet, ils pourront demander une révision à la baisse de la valeur locative de leur logement, qui sert de base au calcul de ces impôts. Les artisans, les commerçants et toutes les entreprises auront, s'ils en font la demande, systématiquement trois mois de délai de paiement pour leurs cotisations sociales et ils pourront aussi bénéficier de remises et de délais sur leurs impôts (impôt sur les sociétés, TVA, notamment).
Les agriculteurs, quant à eux, seront indemnisés à travers le Fonds national de garantie des calamités agricoles. Les ostréiculteurs bénéficieront d'un plan d'aide supplémentaire.
Lundi 1er mars, en soirée, le gouvernement a signé l'arrêté de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Les sinistrés pourront ainsi être indemnisés également sur les dégâts causés par les inondations.
Présente dès le lundi matin à La Rochelle et sur l’ensemble des côtes charentaises, Ségolène Royal, présidente de la Région Poitou-Charentes, a demandé la mise en place en urgence d’un plan mobile home. A la suite des visites qu’elle a effectuées sur le terrain, Ségolène Royal a estimé que la principale demande des habitants sinistrés est de retrouver au plus vite un domicile sec, chauffé et en famille. En plus de la prise en charge psychologique des sinistrés et familles des victimes, l’urgence est donc la mise à disposition de mobile homes. La Région souhaite mettre en place un plan de livraison de mobile homes. 600 à 800 sont nécessaires.
Mardi 2 mars, Dominique Bussereau, portant la double casquette de secrétaire d'Etat aux Transports et de président du département de Charente-Maritime, était présent sur l'île d'Oléron pour faire le tour des communes sinistrées. Là encore des mesures ont été annoncées, à savoir le déblocage de 7 ME pour les réparations de la voirie, mais aussi 120 à 150 M€ pour la réparations des digues. Il a aussi expliqué que le président de la fédération des campings allait mettre à disposition des mobile homes. Il a aussi demandé à la présidente de la Région que les procédures d'indemnisations soient communes pour toutes les demandes d'aides comme cela avait été le cas en 1999.
«C’est le coup de trop. Nous n’avions pas besoin de cela !» François Patsouris, président de la section régionale conchylicole, est effondré à l’image de l'ensemble des ostréiculteurs du bassin de Marennes-Oléron. Si les parcs en mer n’ont, semble-t-il, pas trop souffert, à terre c’est la catastrophe. «A terre, nous sommes à genoux», résumait celui qui cédera sa place de président dans les jours à venir. Un départ sur une nouvelle catastrophe après la tempête de 1999 et la crise de surmortalité depuis deux ans. Difficile cependant, deux jours après le passage de Xynthia, de tirer un bilan. Il faut encore que les ostréiculteurs se rendent sur leurs parcs, mais pour certains cette démarche est impossible : la tempête a détruit leur matériel. Alors certes les aides promises permettront de rembourser le matériel détruit mais qu'en est-il de tout ce travail perdu, ce moral une fois de plus touché ?
La rédaction remercie Christiane Anselme, Claudine Gaillard, Emmanuelle Mucelli, Sophie Pigeaud et Luc Zindel pour leur précieuse collaboration.
Les visages fermés, les traits tirés et inquiets… Les élus de Saint-Georges ont installé, lundi matin, 1er mars, une cellule de crise dans la salle du conseil municipal. Saint-Georges a payé un lourd tribut lors du passage de Xynthia puisqu’une octogénaire a perdu la vie, noyée dans sa maison inondée. Alors que les habitants s’organisent, les pompiers sont toujours à pied d’œuvre à Boyardville, submergée par les eaux à la suite de la rupture de la digue de la Perrotine. La pluie persistante ajoute à la désolation. Ici, des propriétaires de restaurants évacuent la boue de leur établissement, un autre tente de raccrocher une enseigne qui menace de s’écrouler, à proximité, des habitants chaussent des cuissardes afin d’embarquer dans le canot des pompiers qui doit les amener chez eux récupérer ce qui peut l’être (photo ci-dessous). Déjà une première embarcation arrive avec à son bord deux habitantes hébétées. Un ancien, Oléronais «depuis toujours», avouait que «de mémoire d’Oléronais, on n’avait jamais vu ça, jamais». Et partout des pompiers qui s’activent autour de gros tuyaux chargés de pomper l’eau. Les gendarmes aussi sont présents pour surveiller la zone et protéger ce qui peut l’être encore dans les habitations. Car si la solidarité est bel et bien présente, cela n’empêche pas le vol dans les maisons délaissées dans la nuit par les habitants surpris par la brusque montée des eaux. Comment décrire cette zone si touristique, aujourd’hui sous les eaux. Un vrai sentiment de désolation, de tristesse.
A La Brée, la tempête semble avoir fait une pause. Quelques pins élagués sur le front de mer. Du sable qui est parti, un arbre tombé dans une propriété… La commune a été épargnée. La route des Trois-Pierres, à Saint-Denis n’existe plus. Le bitume est parti, volatilisé. A Chassiron, les barrières de protection devant la falaise sont à terre. La digue aussi a souffert.
Les plages de Saint-Pierre à Saint-Trojan témoignent de la force de Xynthia. Partout la même scène désolante : les plages saccagées, souillées... enfin quand elles sont encore accessibles ce qui n’est plus le cas à Grand-Village. Le vent et la marée ont coupé la dune à grands coups de serpe. Impossible de descendre sur ce qui était, il y a encore quelques jours, une plage. Un grand vide apparaît au bout du chemin d’accès. Un blockhaus oublié refait même surface. Les blockhaus justement de la plage de Vertbois, à Dolus, qui étaient voués à disparaître dans les mois à venir, semblent suspendus. Quant au trait de côte, il a reculé inexorablement. Même cause, même effet à Saint-Pierre et sur les plages de la Biroire ou de la Menounière. A Saint-Trojan, les pompiers sont omniprésents, essayant de combattre l’eau qui s’accumule sur le parking face au port. L’odeur de fuel, qui prend à la gorge, apporte une touche supplémentaire au spectacle de désolation. Une équipe de dépollution est d’ailleurs présente, tout comme au chantier naval de la Perrotine immergé où 50 m3 de fuel doivent être pompés. A Saint-Trojan donc l’eau a pris possession du front de mer : le parking face au port, mais aussi celui face à la place du Marché, le terrain de jeux est transformé en piscine, la caserne des pompiers et la salle des fêtes inutilisables car sous les eaux… La commune du Château, enfin, n’a pas échappé à cette tempête. La D 734, entre le pont et la commune, est jonchée de détritus, de casiers d’ostréiculteurs. Là, une cabane éventrée sur le bord de la route. Ici, un bateau échoué sur la route. ça et là des mannes éparpillées. Malgré tout, dès lundi, la vie reprenait son cours : on s’attachait à faire disparaître le plus vite possible les stigmates du passage de Xynthia. La saison est toute proche. Mais pour Lionel Pacaud, directeur de la Maison du tourisme, tout sera prêt pour accueillir les vacanciers. «Aujourd'hui, nous revoyons le plan de communication puisque nous avions des campagnes qui devaient commencer dans quelques jours. D'un point de vue touristique, hormis Boyardville, Saint-Trojan et une partie du Château, 99% des installations hôtelieres, campings et villages vacances sont opérationnelles. Ensuite, il faudra rassurer les visiteurs potentiels. Nous allons retrousser nos manches.»
Europe, Etat, Région, Département : tous solidaires
Lundi 1er mars, après avoir survolé en hélicoptère les côtes charentaises, Nicolas Sarkozy, président de la République, a annoncé une série de mesures d'urgence qui allaient être prises par le gouvernement. Ainsi, à la demande de ce dernier, l'Union européenne a accepté d'activer le fonds de solidarité communautaire. Il remboursera une partie du coût des interventions publiques (remise en état des infrastructures, notamment).
De plus, les foyers sinistrés pourront obtenir des délais de paiement de leurs impôts. Ceux dont l'habitation a été détruite ou est vouée à la démolition n'auront plus à payer de taxe d'habitation ni de taxe foncière. Ceux qui ont subi des dégradations de leur habitat pourront payer moins d'impôts locaux. En effet, ils pourront demander une révision à la baisse de la valeur locative de leur logement, qui sert de base au calcul de ces impôts. Les artisans, les commerçants et toutes les entreprises auront, s'ils en font la demande, systématiquement trois mois de délai de paiement pour leurs cotisations sociales et ils pourront aussi bénéficier de remises et de délais sur leurs impôts (impôt sur les sociétés, TVA, notamment).
Les agriculteurs, quant à eux, seront indemnisés à travers le Fonds national de garantie des calamités agricoles. Les ostréiculteurs bénéficieront d'un plan d'aide supplémentaire.
Lundi 1er mars, en soirée, le gouvernement a signé l'arrêté de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle. Les sinistrés pourront ainsi être indemnisés également sur les dégâts causés par les inondations.
Présente dès le lundi matin à La Rochelle et sur l’ensemble des côtes charentaises, Ségolène Royal, présidente de la Région Poitou-Charentes, a demandé la mise en place en urgence d’un plan mobile home. A la suite des visites qu’elle a effectuées sur le terrain, Ségolène Royal a estimé que la principale demande des habitants sinistrés est de retrouver au plus vite un domicile sec, chauffé et en famille. En plus de la prise en charge psychologique des sinistrés et familles des victimes, l’urgence est donc la mise à disposition de mobile homes. La Région souhaite mettre en place un plan de livraison de mobile homes. 600 à 800 sont nécessaires.
Mardi 2 mars, Dominique Bussereau, portant la double casquette de secrétaire d'Etat aux Transports et de président du département de Charente-Maritime, était présent sur l'île d'Oléron pour faire le tour des communes sinistrées. Là encore des mesures ont été annoncées, à savoir le déblocage de 7 ME pour les réparations de la voirie, mais aussi 120 à 150 M€ pour la réparations des digues. Il a aussi expliqué que le président de la fédération des campings allait mettre à disposition des mobile homes. Il a aussi demandé à la présidente de la Région que les procédures d'indemnisations soient communes pour toutes les demandes d'aides comme cela avait été le cas en 1999.
Les ostréiculteurs touchés
«C’est le coup de trop. Nous n’avions pas besoin de cela !» François Patsouris, président de la section régionale conchylicole, est effondré à l’image de l'ensemble des ostréiculteurs du bassin de Marennes-Oléron. Si les parcs en mer n’ont, semble-t-il, pas trop souffert, à terre c’est la catastrophe. «A terre, nous sommes à genoux», résumait celui qui cédera sa place de président dans les jours à venir. Un départ sur une nouvelle catastrophe après la tempête de 1999 et la crise de surmortalité depuis deux ans. Difficile cependant, deux jours après le passage de Xynthia, de tirer un bilan. Il faut encore que les ostréiculteurs se rendent sur leurs parcs, mais pour certains cette démarche est impossible : la tempête a détruit leur matériel. Alors certes les aides promises permettront de rembourser le matériel détruit mais qu'en est-il de tout ce travail perdu, ce moral une fois de plus touché ?
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La rédaction remercie Christiane Anselme, Claudine Gaillard, Emmanuelle Mucelli, Sophie Pigeaud et Luc Zindel pour leur précieuse collaboration.
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j'ai vu à la télévision ou sur les jounaux les dégâts provoqués par Xynthia sur les côtes charentaises et vendéennes, et bien entendu sur les îlesde Ré, d'Aix ou d'Oléron. Je pense qu'il est important de souligner que les médias ont minimisé ceux ci sur l'Ile d'Oléron, et je remercie "thalassa" d'avoir ouvert une parenthèse sur les problèmes des oléronnais !... Lorsque je me suis rendue sur place quelques jours après la tempête j'ai constaté le désarrois de ces familles, de ces commercants qui ont tout perdu et je suis révoltée du peu de soutien moral apporté à tous ces gens qui n'ont pas eu les moyens d'acheter à des prix exorbitants des terrains en front de mer et construire une maison. Eux se battaient seuls avec leurs déchets ou leur boue car leurs finances ne leur permettront pas de rénover à l'identique ce qu'ils ont perdu. Ils ont reçu de l'aide, c'est indiscutable mais psychologiquement et financièrement cela restera à tout jamais gravé dans leurs mémoires... et leur budget ! je suis oléronnaise de coeur et quelque part j'ai honte de ne pouvoir plus efficacement les aider. La perte de vies humaines sur les côtes charentaises est dramatique mais interrogeons nous sur ces obtentions de permis de construire et sur ceux qui les ont exigés ! la responsabilité morale est parfois très lourde à supporter . A tous courage