Pas d'huîtres en 2010 et peu en 2009
Le spectre de la grave crise de 1970 qui avait décimé les huîtres plates se profile dans le bassin Marennes-Oléron qui a perdu, depuis juin, 30 % à 80 % de ses jeunes huîtres. Tous les bassins français ont été touchés par cette surmortalité dont les causes seraient multiples.
Le volubile François Patsouris, président de la Section régionale conchylicole de Marennes-Oléron, est inquiet face à la crise de surmortalité des jeunes huîtres apparue dans le bassin et sur la globalité des côtes françaises au début du mois de juin. «Cette crise a commencé à la pointe du Groin sur l’île de Ré au début du mois de juin, précise le président, et elle s’est étendue dans le sud au Pertuis de Maumusson à la fin du mois de juillet. Tous les bassins français sont touchés par cette crise. Aujourd’hui, 80% des petites huîtres sont mortes, ce qui signifie qu’en 2010 il n’y aura pas d’huîtres. De plus, 30% des huîtres de 2 ans ont été également décimées, il y en aura donc peu en 2009.» Les huîtres de un an sont les plus durement touchées, que les souches aient été sélectionnées en écloserie ou qu'elles soient issues de captage naturel effectué durant l'été 2007.
Dès la découverte de cette surmortalité, l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer) a cherché les raisons d’une telle catastrophe. «Elles seraient multiples, reprend François Patsouris. Tout d’abord, il n’y a pas eu d’hiver depuis deux ans. Avec le réchauffement de l'eau, les huîtres ont poussé trop vite. La chaleur conjuguée à une eau plus douce ont favorisé le développement de phytoplanctons dont les huîtres se sont gavées. De plus, un virus pathogène aurait également été identifié.»
Manifestation à La Rochelle
Aujourd’hui, la crise semble être passée mais les esprits eux n’ont cessé de s'échauffer tout au long de l’été, «une période qui n’est évidemment pas propice pour faire bouger les choses et les ministères», concède, amer, le président des ostréiculteurs. «Forcement, il y a de la grogne face aux mesures proposées par le gouvernement et jugées insuffisantes.» Ces mesures comprennent, en particulier, outre la mobilisation du Fonds d’allègement des charges et l’octroi de prêts bonifiés de trésorerie, la mise en œuvre de la procédure des calamités agricoles avec un taux d’indemnisation porté à titre exceptionnel de 12 % à 20 %. Cependant, une centaine d'ostréiculteurs, lundi 25 août, ont déversé des tas de coquilles d’huîtres devant la préfecture de Charente-Maritime, à La Rochelle, en signe de protestation. «Ils ont obtenu des choses mais ils estiment que le compte n’y est pas. Il manque des mesures d’accompagnement pour les entreprises en 2008 et en 2009. Nous voulons un plan de relance concertée. Il va falloir réfléchir au devenir de la profession. Sous le contrôle de l’Etat ou de l’Ifremer, il faut travailler, sans pour autant devenir des apprentis sorciers, à la possibilité d'utiliser des souches plus résistantes et adaptées à notre terroir. Aujourd’hui, je suis très inquiet sur le devenir des petites entreprises d’élevage.»
Une inquiétude relayée par le député de la circonscription, Dider Quentin, qui, dès le début de l’été, a interpellé le ministre de l’Agriculture et de la Pêche, Michel Barnier, qui est venu sur place en juillet. Il rappelait alors que «selon les premiers constats réalisés par l’Ifremer, cette crise serait la plus grave depuis celle qui décima l’huître portugaise. Elle touche désormais l’huître creuse, d’origine japonaise, qui représente actuellement 99% de la production française.»
Si la Région a exorté Michel Barnier à déclencher la procédure de calamité, de son côté le Département a apporté une aide complémentaire aux ostréiculteurs sinistrés. Outre les remises de redevances domaniales et les reports de cotisations sociales décidés cet été, le président du Conseil général proposera, lors de sa prochaine session, la création d’un fonds de solidarité destiné à abonder les indemnisations accordées par l’Etat.
Photo : Sébastien Laval
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