Le Tour de France à Oléron en 1983
Si le Tour de France part cette année de Corse, il y a trente ans, lors de l’édition 1983, Oléron était la première île à accueillir une étape de la prestigieuse boucle. Partie de Nantes, cette septième étape se conclut à Saint-Pierre-d’Oléron, et sera la seule à ce jour à s’être aventurée en Oléron. En l’absence de Bernard Hinault, les Oléronais reportent leur attention sur le jeune Stephen Roche, futur vainqueur de l’édition 1987 et régional de l’étape.
Juillet 1982. Bernard Hinault survole le Tour de France qu’il remporte pour la quatrième fois réalisant cette année son premier doublé Giro (Tour d’Italie) et Tour de France. Le 14 juillet, le journal Sud-Ouest annonce l’arrivée d’une étape du tour 1983 en Oléron. Le président du Pédal Club Oléronnais, Serge Delsol, confirme la nouvelle le 23 du même mois dans le journal Oléron Hebdo qui détaille l’information encore hypothétique. «C’est notre confrère d’Antenne 2, le Rochelais Pierre Salviac, qui a téléphoné à Serge Delsol de la part de Félix Lévitan, le patron du Tour. Il s’agissait de connaître l’attitude des cyclistes oléronais face à une telle proposition. La réponse de Serge Delsol a été claire. Le Pédal Club se réjouirait d’une telle opportunité mais il n’a ni les moyens humains ni les finances nécessaires.»
Les organisateurs du Tour tiennent à leur projet et demandent au Conseil général de la Charente-Maritime l’aide financière habituelle pour accueillir une étape du Tour, l’une des manifestations sportives les plus regardées dans le monde. Le Département se montre généreux, le plus généreux après le Val-de-Marne, en accordant une subvention de 150 000 francs au comité d’organisation de la Grande Boucle. Le Sivom de l’île d’Oléron, lui, contribue à hauteur de 25 000 francs. En 2013, il faut compter 90 000 € minimum le prix d’entrée pour accueillir l’arrivée d’une étape du Tour. Le Département en profite alors pour faire sa publicité «Charente-Maritime, un département qui gagne» avec au recto de l’affichette le fameux voilier encore dans la mémoire charentaise, vainqueur entre autres de la transat La Rochelle – La Nouvelle-Orléans en 1981 et La Baule – Dakar en 1983.
La question de l’hébergement des coureurs, de la caravane et des quelques milliers de personnes mobilisées sur l’évènement est rapidement résolue. Oléron n’accueillera que l’arrivée de l’étape. Le départ du lendemain matin sera donné à La Rochelle, une ville qui dispose de toutes les infrastructures nécessaires pour accueillir le Tour la veille. En octobre 1982, le tracé du Tour est enfin dévoilé. Oléron devient officiellement ville d’arrivée d’étape.
Le 1er juillet 1983, le Tour de France, créé 80 ans plus tôt mais interrompu pendant les années de guerre, célèbre sa 70e édition. Le Tour part de Roubaix et descend vers l’ouest pour aborder, une fois n’est pas coutume, les Pyrénées en premier. L’édition 1983 laisse une part belle à l’Ouest de la France où quatre étapes se déroulent entre le 7 et le 10 juillet : Châteaubriant – Nantes le 7, Nantes – île d’Oléron Charente-Maritime le 8, La Rochelle – Bordeaux le 9 et Bordeaux – Pau le 10 juillet.
Malgré l’absence du grand champion, Bernard Hinault, forfait à cause de douleurs récurrentes à son genou droit, les Oléronais apportent leur soutien inconditionnel à l’Irlandais Stephen Roche (le futur vainqueur du Tour de France 1987) qui participe alors à son premier Tour (il finira 13e). Stephen Roche est alors le régional de l’étape.
Avec sa femme française, ce natif de Dublin a découvert une autre île, plus petite que son Irlande natale, en venant en vacances à Saint-Denis-d’Oléron. Il retourne régulièrement sur Oléron se ressourcer et s’entraîner. C’est là que le journal Oléron Hebdo du 17 juin 1983 l’interviewe avant le départ du Tour. A la question de savoir si on peut espérer une victoire de Roche à Oléron, le coureur répond : «J’ai regardé un peu la carte et je connais bien l’île, je vais essayer d’être devant. C’est comme arriver chez moi ici. Je connais pas mal de monde maintenant et puis je connais pas mal toutes les routes, je vais essayer d’être placé.» Quatre jours avant l’étape après l’arrivée de Roubaix, l’Irlandais accorde un nouvel entretien au journal et se félicite de retrouver ses amis oléronais prochainement. «Je connais beaucoup de gens à Oléron, c’est tranquille quand je viens en hiver ou en mai-juin, ça ressemble un peu à mon pays. Alors je compte un peu les voir vendredi… Je connais bien le terrain mais je ne suis pas le seul.»
Une fois le pont franchi le tracé de la course conduit les coureurs vers Le Château-d’Oléron puis la Gaconnière, le Petit-Deau, les Chasserles, la Dresserie avant d’arriver à Saint-Pierre-d’Oléron.
La première étape en Charente-Maritime est un succès populaire comme le rapporte le lendemain le journal Sud Ouest. «Le Tour de France 83 a vu hier sa journée la plus chaude. Au surplus, depuis l’entrée de la course dans le département au pont du Braud jusqu’au terminus à Saint-Pierre-d’Oléron, les bas-côtés ont toujours été abondamment garnis. L’objectivité nous oblige cependant à préciser que la foule a atteint des proportions considérables après le franchissement du pont d’Oléron, avec le renfort des touristes.» Un chiffre est même annoncé. «A 4 km de l’arrivée, les spectateurs se tenaient sur trois rangs. Mais en annonçant 300 000 spectateurs, le speaker de Radio Tour a probablement un peu exagéré.»
Quant à la course, elle se résume à une longue étape de plaine où les rares tentatives d’échappées sont reprises par un peloton voulant s’assurer une journée relativement tranquille sous un soleil très vif et sans vent. La victoire semble acquise aux différentes équipes de sprinteurs. Une petite échappée de quatre coureurs s’organise tout de même au km 124 après Hiers-Brouage et n’est reprise qu’à 10 km de l’arrivée. Le final se joue alors sur un sprint massif du peloton dont s’extirpe l’Italien Riccardo Magrini dans les derniers 600 mètres. Il résiste jusqu’au bout à la meute qui le talonne. L’envoyé spécial de Sud Ouest, Hervé Mathurin, écrit que «l’anarchie la plus caractérisée régnait sur la place de Saint-Pierre-d’Oléron où le goudron fondait sous les semelles. Encore heureux qu’elle n’ait pas fait dégénérer une arrivée rendue étriquée par l’exiguïté de la dernière ligne droite. Cela n’empêcha pas Magrini et ses coéquipiers de se décerner force accolades dans le pur style latin.»
Une fois la ligne d’arrivée franchie, les directeurs et suiveurs du Tour sont invités à déguster le pineau et les huîtres servis par les viticulteurs et ostréiculteurs de l’île. Quant aux coureurs, pressés de regagner rapidement La Rochelle pour le départ du lendemain, ils ne peuvent pas pour leur part profiter de ces moments autour des produits locaux.
Pour la petite histoire, le Tour de France 1983 voit la première victoire du regretté Laurent Fignon pour sa première participation. Il devance l’Espagnol Angel Arroyo, le Néerlandais Peter Winnen, le Belge Lucien Van Impe et les Français Robert Alban et Jean-René Bernaudeau.
L’île d’Oléron a été la première île à accueillir directement une étape du Tour de France. Depuis, les coureurs ont emprunté le passage du Gois en 2005 pour se rendre sur l’île de Noirmoutier. La Corse est à l’honneur pour la centième édition en accueillant le départ du Tour pour 2013. Reverra-t-on un jour prochain une étape du Tour de France sur Oléron ou sur les îles de Charente-Maritime ?
Christophe Bertaud
Photo : Le peloton du Tour de France sur la 7e étape Nantes – Oléron vers Aigrefeuille d’Aunis (DR So, collection privée J-M Blaizeau)
Classement de la 7e étape
Septième étape entre Nantes et Saint-Pierre-d’Oléron, 216 km en 5h45mn37s
1er Magrini (ITA-Metauro)
2e Vanderaerden (BEL-Aernoudt)
3e Glaus (SUI-Cilo)
4e De Wilde (BEL-La Redoute)
5e Kelly (IRL-Sem)
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Au vu de l'état des routes ,des trottoirs , des parkings (même payant) ils sont pas prêt d'y avoir droit Cette île est la plus mal entretenue de l'atlantique
Cà y est le tour revient à Oléron en 2020 !